Voici un vrai légume nourricier et oublié, un des plus vieux légumes du monde (l’emploi de son ancêtre sauvage remonte à plus de 4000 ans et sa culture à environ 2000 ans). Avec les bettes à cardes, ce sont les deux seuls légumes originaires d’Europe ! Un légume de conservation qui nourrit toute l’année ! Le chou est également un légume « miracle », grand absent de la pharmacopée européenne.
Souvenirs, souvenirs
Je ne remercierai jamais assez mes parents de m’avoir fait grandir avec le chou ! Il était omniprésent ce chou, à la maison, lui qui aujourd’hui me fait saliver juste à prononcer son nom, à en parler ou écrire à son sujet. En 1976, mes parents ont entrepris de reprendre la ferme familiale et de la convertir en agriculture biologique, quelle drôle d’idée à l’époque ! Mis à part le fait qu’ils étaient considérés comme une secte, la vente de lait cru, beurre et fromage blanc ne permettait pas de nourrir une famille… Heureusement le chou était là ! Oui, autant pour l’alimentation des vaches qu’à notre table. Entier, énorme et cru ! Je le revois dans ce saladier empli de légumes du jardin, notre principale pitance, que nous devions préparer nous-mêmes dans l’assiette, munis d’une râpe pour les betteraves, carottes, radis noir ou autres crusinables ! Il trônait sur la table comme un roi, beau, lumineux de ses verts tendres, comme au potager d’ailleurs. Malgré les corvées de plantation et nombreux autres travaux du jardin avec mes sœurs, ce chou était ma seule réjouissance, enfant privée de frites et de viande, de bonbons et de tout ce qu’offrait la société de consommation. Arrosé généreusement d’une vinaigrette avec du gomasio, son effet appétissant est toujours intact dans ma bouche quarante ans plus tard…
Nous prenions soin d’hiverner à la cave dans un lit de paille la récolte annuelle destinée à nourrir des tablées d’une dizaine de personnes. Durant ces hivers normands longs et glacés, je me revois aller à la cave, découvrir les choux pour en choisir un qui nous offrait toujours une fraîcheur et un croquant intacts. Ces dernières années, il est plus difficile de cultiver du chou dans le nord-ouest où il fait trop chaud, excepté l’année dernière qui était bien une année à chou ! Il affectionne les climats tempérés, la pluie bien sûr ou le littoral aux embruns iodés.
D’après un ancien mythe grec, le chou sauvage serait né des gouttes de transpiration de Zeus. La plante crucifère était, à cette période, utilisée comme plante médicinale plus que plante alimentaire. Les femmes qui allaient accoucher ingéraient du chou pour être certaines d’avoir suffisamment de lait. D’autres encore glissaient dans leur soutien-gorge quelques feuilles, pratique populaire toujours usitée aujourd’hui ! Il était l’antidote et le traitement préventif à l’ivresse pour les Romains, et un grand désinfectant en cas de blessures. Pline l’Ancien a d’ailleurs déclaré que si les Romains s’étaient passé de médecins pendant des siècles, c’était bien grâce à leur consommation de chou…
Il est le légume auquel les médecins ont consacré le plus de thèses et d’ouvrages. Depuis l’Antiquité, il est la panacée par excellence autant en usage interne qu’en usage externe, la trousse de secours d’urgence pour les plaies, les piqûres d’insectes, les crevasses, les panaris, les abcès, les furoncles etc. Les cataplasmes de chou ou une simple feuille posée absorbent et retirent des humeurs les infections suppurantes, puis aident à la cicatrisation, même pour des plaies profondes et douloureuses. C’est un grand dépuratif de l’organisme qui élimine en profondeur les poisons et les déchets. Pour rendre plus douce la feuille de chou, nous pouvons l’ébouillanter quelques minutes, la faire macérer dans de l’huile d’olive ou encore la passer au fer à repasser ! Varices, ulcères, zonas, hémorroïdes et gangrènes, aucun ne résiste à la feuille de chou ! Beaucoup de grand-mères l’employaient pour soulager les douleurs de l’arthrose, mais pas que : les sciatiques, les névralgies, les douleurs musculaires et même les rhumatismes.
En fait, les médecins de campagne le prescrivaient sur tous les organes douloureux en cataplasme, sur le foie (en cas de cirrhose ou de crise), sur les intestins pour les douleurs abdominales et les règles douloureuses, sur le front pour les migraines, sur la poitrine pour les rhumes et l’asthme, en gargarisme contre les angines et aussi en décongestionnant pour la circulation sanguine.
Le chou est riche en vitamine C, en mucilages, en une kyrielle de sels minéraux, d’oligo-éléments et de vitamines. Il est reconstituant, anti-anémique, reminéralisant, antiscorbutique, régénérateur et nutritif cellulaire. Il est diurétique, dépuratif, antiseptique, antioxydant, antibactérien pectoral et antitussif !
Le chou, Brassica oleacera ssp., à l’état sauvage, est l’ancêtre des multiples variétés que l’on connaît aujourd’hui : chou cabus, chou blanc, chou rouge, chou de Bruxelles, chou de Milan, chou chinois, chou Kale (vert, noir ou violet), chou Daubenton… Annuels ou vivaces, les choux se distinguent par une taille fort élevée qui peut atteindre jusqu’à 2,50 m (la variété du chou de Saint Saëns) ! Tous sont des plantes crucifères avec pour caractéristiques communes leurs fleurs à quatre pétales ayant la forme d’une croix…
Le chou est riche en fibres, en antioxydants, en vitamine C principalement (mais aussi K, B1, B6), en minéraux (calcium, potassium, magnésium), en béta-carotène et en oligo-élements (fer, sélénium, sodium, manganèse). Il est modérément calorique par la présence des glucides. Ces caractéristiques en font l’aliment santé par excellence !
Consommé cru, en nature, en début de repas, c’est l’un des meilleurs modes d’absorption. En jus frais (jusqu’à 100 ml par jour), en sirop et aussi en choucroute pour tous les usages internes. Cuit, il est difficile à digérer pour les estomacs fragiles, préférez alors la cuisson à l’étouffée.
En usage externe, c’est le cataplasme qui agira à la manière d’une argile végétale. Il doit rester en place jusqu’à la guérison. Attention : posé durant plusieurs heures, ce remède peut faire apparaître des cloques. Il n’y a pas de contre-indications connues, néanmoins la vitamine K qu’il contient peut interagir avec un traitement anticoagulant.
Le chou a donc de nombreux vertus, aussi bien nutritionnelles que thérapeutiques ! Alors pourquoi donc n’est-il pas inscrit à la pharmacopée européenne comme l’est le persil, le radis noir, l’artichaut, le basilic ou encore le maïs, pour n’en citer que quelques-uns ?
« De la soupe nutritive du matin pour le paysan qui part aux champs à la tisane du soir pour le citadin énervé, le chou a sa place toute la journée sur notre table – et toute la vie pour panser nos plaies. »
Maurice Méssegué, C’est la nature qui a raison (éd. Robert Laffont)
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